trahison. Alors nous devons nous séparer à partir de ce moment. Sachez toutefois qu’en ce cas, sans parler des conséquences désagréables que peut avoir pour vous la dénonciation de Chatoff, vous vous attirerez un autre petit désagrément au sujet duquel on s’est nettement expliqué lors de la création du groupe. Quant à moi, messieurs, je ne vous crains guère… Ne croyez pas que ma cause soit tellement liée à la vôtre… Du reste, tout cela est indifférent.
— Non, nous sommes décidés, déclara Liamchine.
— Il n’y a pas d’autre parti à prendre, murmura Tolkatchenko, — et si Lipoutine nous donne toutes les assurances désirables en ce qui concerne Kiriloff, alors…
— Je suis d’un avis contraire ; je proteste de toutes les forces de mon âme contre une décision si sanguinaire ! dit Virguinsky en se levant.
— Mais ? questionna Pierre Stépanovitch.
— Comment, mais ?
— Vous avez dit mais… et j’attends.
— Je ne croyais pas avoir prononcé ce mot… J’ai seulement voulu dire que si l’on était décidé, eh bien…
— Eh bien ?
Virguinsky n’acheva pas sa phrase.
— On peut, je crois, négliger le soin de sa sécurité personnelle, observa soudain Erkel, — mais j’estime que cette négligence n’est plus permise, lorsqu’elle risque de compromettre l’œuvre commune…
Il se troubla et rougit. Nonobstant les réflexions qui occupaient l’esprit de chacun, tous regardèrent l’enseigne avec surprise, tant ils s’attendaient peu à le voir donner aussi son avis.
— Je suis pour l’œuvre commune, fit brusquement Virguinsky.
Tous les membres se levèrent. Pierre Stépanovitch fit connaître l’endroit où le matériel typographique était enfoui, il distribua les rôles entre ses affidés, et, accompagné de Lipoutine, se rendit chez Kiriloff.