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ainsi dire, précisée, répondit d’un air non moins aimable Von Lembke qui s’était levé aussi ; les dernières paroles de son interlocuteur l’avaient visiblement rasséréné. — J’accepte vos services avec reconnaissance, et soyez sûr que de mon côté je ne négligerai rien pour appeler sur votre zèle l’attention du gouvernement…

— Six jours, l’essentiel, c’est ce délai de six jours ; durant ce laps de temps ne bougez pas, voilà ce qu’il me faut.

— Bien.

— Naturellement, je ne vous lie pas les mains, je ne me le permettrais pas. Vous ne pouvez vous dispenser de faire des recherches ; seulement n’effrayez pas la nichée avant le moment voulu, je compte pour cela sur votre intelligence et votre habileté pratique. Mais vous devez avoir un joli stock de mouchards et de limiers de toutes sortes, hé, hé ! remarqua d’un ton badin Pierre Stépanovitch.

— Pas tant que cela, dit agréablement le gouverneur. — C’est un préjugé chez les jeunes gens de croire que nous en avons une si grande quantité… Mais, à propos, permettez-moi une petite question : si ce Kiriloff a été le témoin de Stavroguine, alors M. Stavroguine se trouve aussi dans le même cas…

— Pourquoi Stavroguine ?

— Puisqu’ils sont si amis ?

— Eh ! non, non, non ! Ici vous faites fausse route, tout malin que vous êtes. Et même vous m’étonnez. Je pensais que sur celui-là vous n’étiez pas sans renseignements… Hum, Stavroguine, c’est tout le contraire, je dis : tout le contraire… Avis au lecteur.

— Vraiment ! Est-ce possible ? fit Von Lembke d’un ton d’incrédulité. — Julie Mikhaïlovna m’a dit avoir reçu de Pétersbourg des informations donnant à croire qu’il a été envoyé ici, pour ainsi dire, avec certaines instructions…

— Je ne sais rien, rien, absolument rien. Adieu. Avis au lecteur !

Sur ce, le jeune homme s’élança vers la porte.

— Permettez, Pierre Stépanovitch, permettez, cria le gouverneur, —