sent et boudent. Le public n’a pas même assez d’initiative pour mettre les braillards à la raison.
— Ah ! que cela est vrai ! Ils se taisent, boudent et… regardent autour d’eux.
— Eh bien, si cela est vrai, vous devez le déclarer hautement, fièrement, sévèrement. Il faut montrer que vous n’êtes pas brisée, et le montrer précisément à ces vieillards, à ces mères de famille. Oh ! vous saurez : vous ne manquez pas d’éloquence, lorsque votre tête est lucide. Vous les réunirez autour de vous et vous leur ferez un discours qui sera ensuite envoyé au Golos et à la Gazette de la Bourse. Attendez, je vais moi-même me mettre à l’oeuvre, je me charge de tout organiser. Naturellement les mesures d’ordre devront être mieux prises ; il faudra surveiller le buffet, prier le prince, prier monsieur… Vous ne pouvez pas nous laisser en plan, monsieur, alors que tout est à recommencer. Et enfin vous ferez votre entrée au bras d’André Antonovitch. Comment va-t-il ?
— Oh ! quels jugements faux, injustes, outrageants vous avez toujours portés sur cet homme angélique ! s’écria avec un subit attendrissement Julie Mikhaïlovna, et peu s’en fallut qu’elle ne fondît en larmes. Sur le moment Pierre Stépanovitch déconcerté ne sut que balbutier :
— Allons donc, je… mais quoi ? J’ai toujours…
— Jamais, jamais ! vous ne lui avez jamais rendu justice !
— Il faut renoncer à comprendre la femme ! grommela Pierre Stépanovitch en grimaçant un sourire.
— C’est l’homme le plus droit, le plus délicat, le plus angélique ! L’homme le meilleur !
— Pour ce qui est de sa bonté, je l’ai toujours hautement reconnue…
— Jamais. Du reste, laissons cela. Je l’ai défendu fort maladroitement. Tantôt la sournoise maréchale de la noblesse a fait plusieurs allusions sarcastiques à ce qui s’est passé hier.
— Oh ! maintenant elle ne parlera plus de la journée d’hier, celle d’aujourd’hui doit la préoccuper bien davantage. Et pourquoi l’idée qu’elle n’assistera pas au bal vou