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pas fini. Tu étais inscrite sur mon testament pour quinze mille roubles, tu les recevras dès maintenant, — après la cérémonie nuptiale. Là-dessus, tu lui donneras huit mille roubles, c’est-à-dire pas à lui, mais à moi. Il a une dette de huit mille roubles ; je la payerai, mais il faut qu’il sache que c’est avec ton argent. Il te restera sept mille roubles, ne lui en donne jamais un seul. Ne paye jamais ses dettes. Si tu le fais une fois, ce sera toujours à recommencer. Du reste, je serai là. Vous recevrez annuellement de moi douze cents roubles, et, en cas de besoins extraordinaires, quinze cents, indépendamment du logement et de la table qui seront aussi à ma charge ; je vous défrayerai sous ce rapport, comme je le défraye déjà. Vous n’aurez à payer que le service. Vous toucherez en une seule fois tout le montant de la pension annuelle que je vous fais. C’est à toi, entre tes mains que je remettrai l’argent. Mais aussi sois bonne ; donne-lui quelque chose de temps en temps et permets-lui de recevoir ses amis une fois par semaine ; s’ils viennent plus souvent, mets-les à la porte. Mais je serai là. Si je viens à mourir, votre pension continuera à vous être servie jusqu’à son décès, tu entends, jusqu’à son décès seulement, parce que cette pension, ce n’est pas à toi que je la fais, mais à lui. Quant à toi, en dehors des sept mille roubles dont j’ai parlé tout à l’heure et que tu conserveras intégralement si tu n’es pas une bête, je te laisserai encore huit mille roubles par testament. Tu n’auras pas davantage de moi, il faut que tu le saches. Eh bien, tu consens ? Répondras-tu, à la fin ?

— J’ai déjà répondu, Barbara Pétrovna.

— N’oublie pas que tu es parfaitement libre : il sera fait comme tu l’as voulu.

— Permettez-moi seulement une question, Barbara Pétrovna : est-ce que Stépan Trophimovitch vous a déjà dit quelque chose ?

— Non, il n’a rien dit, il ne sait rien encore, mais… il va parler tout de suite.