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CHAPITRE IV

la boiteuse.

I

Chatoff ne fit pas la mauvaise tête, et, conformément à ce que je lui avais écrit, alla à midi chez Élisabeth Nikolaïevna. Nous arrivâmes presque en même temps lui et moi ; c’était aussi la première fois que je me rendais chez les dames Drozdoff. Elles se trouvaient dans la grande salle avec Maurice Nikolaïévitch, et une discussion avait lieu entre ces trois personnes au moment où nous entrâmes. Prascovie Ivanovna avait prié sa fille de lui jouer une certaine valse, et Lisa s’était empressée de se mettre au piano ; mais la mère prétendait que la valse jouée n’était pas celle qu’elle avait demandée. Maurice Nikolaïévitch avait pris parti pour la jeune fille avec sa simplicité accoutumée, et soutenait que Prascovie Ivanovna se trompait ; la vieille dame pleurait de colère. Elle était souffrante et marchait même avec difficulté. Ses pieds étaient enflés, ce qui la rendait grincheuse ; aussi depuis quelques jours ne cessait-elle de chercher noise à tout son entourage, bien qu’elle eût toujours une certaine peur de Lisa. On fut content de nous voir. Élisabeth Nikolaïevna rougit de plaisir, et, après m’avoir dit merci, sans doute parce que je lui avais amené Chatoff, elle avança vers ce dernier en l’examinant d’un œil curieux.