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Alors ils me prirent et me fouettèrent.

— Mais pourquoi ? pourquoi donc ?

— Parce que j’étais trop savant. Il y a bien des motifs pour fouetter un homme ! dit d’un ton sentencieux Maximov.

— En voilà assez, c’est idiot ! Moi qui croyais que ce serait amusant ! dit Grouschegnka.

Mitia cessa de rire. Le pane aux grandes jambes se leva et se mit à marcher de long en large, de l’air hautain d’un homme qui s’ennuie dans une compagnie indigne de lui.

— Quel marcheur ! dit Grouschegnka d’un ton de mépris.

Mitia, s’apercevant tout à coup que le pane à la pipe le regardait avec des yeux pleins de colère, lui cria :

— Buvons, pane !

Puis s’adressant à celui qui se promenait :

— Buvons, pane ! répéta-t-il. À la Pologne, panove[1] ! Je bois à votre Pologne !

— Soit, pane, buvons ! dit le pane à la pipe d’un air important, mais courtois.

Il prit son verre.

— Et l’autre pane aussi ! comment s’appelle-t-il ?… prenez un verre, pane !

— Pane Vroublevsky, dit le pane à la pipe.

— Hourra pour la Pologne, panove ! cria Mitia en levant son verre.

Ils trinquèrent. Mitia reprit la bouteille et remplit de nouveau trois verres.

  1. Pluriel de pane.