arrive, j’aurai expié… Une vie nouvelle… mi homme nouveau… Alors je serai digne de son amitié ! car, sais-tu cela, Alioscha ? elle est capable d’amitié comme un homme ! Et nous serons unis pour quelque grande œuvre ! Elle l’aimera, Alioscha, dit-il en désignant Grouschegnka, car il faut qu’elles s’aiment pour que nous soyons unis !… Tous heureux, tous meilleurs ! Vois-tu, frère, reprit-il pensif après un silence, notre bonheur n’est plus en nous, nous l’avons tous trop usé en espérance, nous nous dévouerons, frère, au bonheur des autres, à notre petite mère Russie ! Ivan saura, quand il se réveillera, que tout n’est pas permis… Moi, je le sais déjà, et toi, Alioschegnka, je ne t’ai pas appelé pour rien, tout à l’heure, l’homme de Dieu. Tu nous dirigeras, tu seras notre tête, notre chef, notre saint !
Il se fit un grand silence ; les deux frères se regardaient avec enthousiasme, Grouschegnka elle-même était émue.
— Frère, pour tout cela, il faut que tu t’évades, reprit Alioscha. Elle aussi veut que tu te sauves, comme elle te l’a déjà fait dire ; elle m’a prié de te le répéter.
— Eh bien, je me sauverai. Je m’évaderai, Grouschegnka, reprit-il en se tournant vers elle. Je serai libre, puisque vous le voulez tous. Va donc pour l’Amérique ! Est-ce que je reviendrai, Alioscha ?
— Oui, Mitia, tu reviendras, ton exil ne sera pas long, j’irai te chercher, frère.
— Toi ! Alors, c’est bien. Si j’ai ta promesse, je suis tranquille. C’est cela. Je partirai, tu viendras me chercher, et de nouveau et pour toujours la petite mère Russie ! Oh ! Alioscha, j’aime joyeusement tout le monde !… Écoute, elle veut que je me sauve ? Dis-lui que, moi, je veux, insista-