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Mitia tressaillit. Il voulut parler, il ne le put. Cette nouvelle lui causait une émotion profonde. Il aurait évidemment désiré des détails sur l’entrevue de Katherina Ivanovna et d’Alioscha, mais il n’osait les demander. Un mot cruel ou dédaigneux de Katia eût été pour lui, en ce moment, un coup de couteau.

— Elle a dit entre autres choses qu’il fallait tranquilliser ta conscience au sujet de l’évasion. C’est elle qui conduira l’affaire si Ivan n’est pas guéri à ce moment.

— Tu m’en as déjà parlé, dit Mitia.

— Et toi, tu as déjà eu le temps de répéter cela à Grouscha, remarqua Alioscha.

— Oui, avoua Mitia… Elle ne viendra pas ce matin, continua-t-il en regardant timidement son frère. Elle ne viendra que ce soir. Quand je lui ai dit, hier, que Katia agissait, elle n’a rien répondu d’abord, mais ses lèvres se sont contractées, puis elle a murmuré : « Soit ! » Elle sent que c’est nécessaire. Je ne l’ai pas interrogée, j’ai craint… Je crois qu’elle a compris que c’est Ivan que Katherina Ivanovna aime, et non plus moi.

— Est-ce bien vrai ?

— Peut-être non… Enfin, elle ne viendra pas ce matin, je l’ai chargée d’une commission… Écoute, notre frère Ivan est un homme supérieur, c’est à lui de vivre, il guérira.

— Imagine-toi que Katia ne met presque pas en doute cette guérison.

— Alors c’est qu’elle est convaincue qu’il mourra ; c’est la frayeur qui la fait parler ainsi.