père, et peut-être davantage, tandis que si Fédor Pavlovitch avait épousé cette dame Agrafeana Alexandrovna, vous n’auriez rien eu.
Ivan Fédorovitch avait peine à se contenir.
— C’est bien, fînit-il par dire. Tu vois, je ne t’ai pas battu !… Alors, d’après toi, j’avais chargé mon frère Dmitri de l’action, je m’en reposais sur lui ?
— Certainement ! En assassinant, il perdait tous ses droits à la noblesse, aux dignités et à la propriété, et ce n’était plus quarante mille roubles qui vous revenaient, mais la moitié du tout, c’est-à-dire soixante mille.
— Eh bien, je supporte cela encore ! Mais écoute, misérable, c’est sur toi, non pas sur Dmitri, que j’aurais pu compter pour l’assassinat, et, je te le jure, à ce moment-là, j’ai pressenti quelque ignominie de ta part ; je me rappelle très nettement cette impression.
— Moi aussi j’ai senti que vous comptiez sur moi, dit avec une extraordinaire puissance d’ironie Smerdiakov, et par là même j’ai compris que si, malgré ce pressentiment, vous partiez, c’était comme si vous me disiez : « Tu peux tuer mon père, je ne te le défends pas. »
— Misérable ! tu avais compris cela ?
— Jugez donc vous-même : vous alliez partir pour Moscou, vous aviez refusé à votre père d’aller à Tcheremachnia, et vous déférez aussitôt à l’invitation d’un homme tel que moi ! C’est donc que vous attendiez quelque chose de moi.
— Non, je jure que non ! cria Ivan en grinçant des dents.
— Comment donc « non » ? Vous auriez dû, vous, fils