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tonnait dans son beau châle noir. Elle produisit sur les juges une très-bonne impression.

En entrant, elle avait jeté sur Mitia un regard furtif : Mitia lui avait répondu par un regard d’inquiétude, mais s’était aussitôt tranquillisé.

Après les questions d’usage, Nikolay Parfenovitch lui demanda quelles étaient ses relations avec le lieutenant en retraite Dmitri Fédorovitch Karamazov.

— C’est mon ami.

Elle expliqua avec franchise que, par moments, il lui avait plu, mais que, jusqu’à ce jour, elle ne l’avait jamais aimé et qu’elle ne l’avait séduit que par méchanceté, comme son père Fédor Pavlovitch.

— D’ailleurs, depuis un mois, je ne m’occupais guère d’eux… J’attendais un autre homme, coupable envers moi… Mais je crois inutile de vous parler de cela, c’est une affaire particulière,

Le juge passa aussitôt à cette question qui l’intéressait tant.

— Combien Dmitri Fédorovitch avait-il d’argent ?

À quoi Grouschegnka répondit qu’elle n’avait pas compté elle-même les billets, mais qu’elle avait souvent entendu Dmitri dire qu’il avait trois mille roubles.

— Mais ne l’avez-vous pas aussi entendu dire, au moins une fois, qu’il avait, à son premier voyage ici, dépensé non pas trois mille roubles, mais une somme moindre, et qu’il avait caché le reste ? demanda le procureur.

— Non, jamais.

— N’a-t-il jamais dit devant vous, demanda tout à coup Nikolay Parfenovitch, qu’il avait l’intention d’attenter aux jours de son père ?