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— Pardonnez, pardonnez-vous tous, dit-il en saluant tout autour de lui ses visiteurs.

Dmitri Fédorovitch resta d’abord comme pétrifié. Comment ! un salut jusqu’à terre ! à lui ! Quoi donc ?

— Mon Dieu ! s’écria-t-il tout à coup ; et étreignant son front dans ses mains, il se précipita hors de la chambre.

Tous les invités le suivirent sans même penser à prendre congé du starets ; seuls, les moines s’approchèrent pour la bénédiction.

— Que signifie ce salut jusqu’à terre ? Est-ce un symbole ? demandait Fédor Pavlovitch, visiblement troublé, mais cherchant à se rassurer en parlant, sans toutefois s’adresser à personne en particulier.

Ils dépassèrent l’enceinte.

— Tas de fous ! dit Mioussov, d’un air méchant. En tout cas, je vais me dispenser de votre compagnie, Fédor Pavlovitch, et pour toujours, vous pouvez m’en croire… Où donc est le moine qui nous a invités à dîner chez le supérieur ?…

Précisément, ce moine venait à la rencontre des invités.

— Je vous prie, mon Père, de m’excuser auprès du Père supérieur, moi, Mioussov. Des circonstances imprévues m’enlèvent l’honneur de partager sa collation, malgré tout mon sincère désir, dit avec irritation Petre Alexandrovitch.

— Cette « circonstance imprévue », c’est moi, dit aussitôt Fédor Pavlovitch, entendez-vous, Père ? C’est avec moi que Petre Alexandrovitch ne veut pas rester. Mais daignez, Petre Alexandrovitch, daignez vous rendre chez le Père supérieur, et bon appétit ! C’est moi qui m’esquive. À la maison ! Chez moi ! C’est chez moi que je mangerai.