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la première fois que je viens, m’as-tu oubliée ? Tu n’as pas bien bonne mémoire ! On disait chez nous : Il est malade. Alors je me suis dit : Il faut que j’aille le voir. Et je vois maintenant que tu n’es pas déjà si mal. Tu vivras encore vingt ans, sois-en sûr ! Que Dieu te garde ! Assez de gens prient pour toi, tu n’as rien à craindre, va !

— Merci, ma fille.

— À propos, j’ai une petite prière à te faire. J’ai apporté soixante kopeks : donne-les, mon Père, à une plus pauvre que moi. Je me suis dit : C’est par son intermédiaire que je veux les donner.

— Merci, ma fille, merci. Tu es une bonne âme. Je ferai comme tu veux. Est-ce une fille que tu portes là sur tes bras ?

— Une fille, mon père, Lizaveta.

— Que Dieu vous bénisse toutes deux ! Tu m’as fait plaisir, mère. Adieu, mes enfants.

Il bénit tout le monde et salua profondément.

IV

La pomiestchitsa, qui assistait à cette scène, pleurait doucement. C’était une femme du monde, sensible et d’instincts sincèrement bons. Elle fit quelques pas au-devant du starets qui venait vers elle, et lui dit avec enthousiasme :

— Que je suis émue !…