LES FRÈRES KARAMAZOV. 283
— Ce serait trop long à raconter. Tu en sais assez.
— Et Mitegnka! S'il le savait! Le sait-il?
— Pas du tout. Il me tuerait. Mais je n'ai plus peur de lui. Tais-toi, Rakitka, ne me parle pas de lui. Il m'a fait trop de mal. D'ailleurs je ne veux penser qu'à Alioschegnka et ne regarder que lui. Ris donc un peu, mon chéri. Égaye-toi un peu pour me faire plaisir ! Ah ! il a souri ! il a souri! Vois comme il me regarde gentiment! Sais-tu, Alioscha? Je te croyais fâché contre moi à cause de ce qui s'est passé avant-hier chez cette barichnia. J'ai agi en chienne! Seulement, je ne regrette rien. C'était bien et mal à la fois, continua-t-elle d'un air rêveur.
Un méchant sourire lui vint aux lèvres.
— Mitia m'a dit qu'elle criait : Il faut la fouetter! Dieu! que je l'ai offensée! Elle Aoulait me vaincre. Hé! hé! Nous avons pris le chocolat ensemble... Elle pensait me séduire... Mais tout cela est très-bien, ajouta-t-elle en sou- riant. Je crains seulement que tu en aies été fâché...
— En effet, dit Rakitine avec un réel étonnement, elle te craint, toi, le petit poussin.
— Le petit poussin!... Pour toi peut-être, Rakitine, parce que tu n'as pas de conscience. Moi, je l'aime. Me crois-tu, Alioscha? Je t'aime de toute mon âme.
— Ah ! l'effrontée ! Mais c'est une déclaration !
— Eh bien ! c'est comme ça !
— Et l'officier? et la bonne nouvelle de Mokroïe ?
— C'est une autre affaire!
— Logique de baba !
— Ne me mets pas en colère, Rakitka. Je te dis que c'est une autre affaire. C'est vrai, Alioscha, que j'ai eu à
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