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retenu. Je prierai pour lui et pour vous. Alioscha, nous serons heureux... Le serons-nous?

— Je crois que oui, Liza.

En sortant de chez Liza, AHoscha ne pensa pas à passer par l’appartement de madame Khokhiakov; mais au mo- ment où il ouvrait la porte, madame Khokhiakov parut. Des les premiers mots, Alioscha devina qu’elle l’attendait.

— Alexey Fédorovitch, ce sont là des enfantillages, des folies. J’espère que vous n’allez pas les prendre au sérieux. Dis bêtises! des bêtises! s’écria-t-elle avec emportement.

— Au moins, ne le lui dites pas, car cela lui ferait mal.

— Voilà une parole sage. Faut-il comprendre que vous- même, par pitié, n’avez pas voulu la contredire?

— Non pas, du tout, c’est très-sérieux ; j’étais très-sérieux en lui parlant, répliqua avec fermeté Alioscha.

— Sérieux? C’est impossible. D’abord, je vous refuserai la porte et je m’en irai! et je l’emmènerai! sachez-le 1

■— Pourquoi? dit Alioscha. C’est encore si loin! Dix-huit mois peut-être à attendre.

— C’est vrai, Alexey Fédorovitch, en dix-huit mois vous pouvez mille fois vous quereller et vous brouiller. Mais je suis si malheureuse! Soit, ce sont des bêtises, mais cela m’inquiète. Je suis comme Famoissa dans la deuxième scène, et vous êtes Tchatski; elle, c’est Sofia ’. Je suis restée pour vous rencontrer. Dans la comédie aussi, toutes ces choses pathétiques se passent dans l’escalier. J’ai tout entendu, je me contenais à peine. Voilà donc l’explica- tion des crises nerveuses de cette nuit ! L’amour pour la

■ Personnages d’une comédie de Griboïedov : le Malheur d’avoir trop d’esprit.