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LES FRÈRES KARAMAZOV. 179

mien même... Mais je ne suis pas au courant de toute cette affaire..., s'empressa-t-il d'ajouter, on ne sait pour- quoi.

— C'est une affaire d'honneur et de devoir, Alexey Fédorovitch; c'est quelque chose de plus encore peut-être, oui, plus encore que le devoir lui-même ! Je vous dirai tout en deux mots : s'il épouse cette... créature, ce que je ne pourrais jamais lui pardonner, je ne l'abandonnerai pourtant pas, je ne l'abandonnerai jamais ! fit-elle avec une exaltation maladive. Non pas que je sois résolue à le suivre, à l'importuner de mes soins, à le faire souffrir! Point. Je m'en irai dans une autre ville, n'importe où, mais je ne cesserai pas de m'intéresser à lui. Quand il sera malheu- reux, — ce qui ne tardera certainement pas, — qu'il vienne à moi. Je serai pour lui une amie, une sœur : une sœur seulement, certes, toujours, mais une sœur aimante, qui lui ai sacrifié toute ma vie. Je réussirai ainsi à me faire comprendre de lui et à obtenir sa confiance! s'écria-t-elle avec une sorte de fureur. Je serai pour lui le Dieu qu'il priera à genoux , et c'est le moins qu'il me doive pour effacer sa trahison et tout ce que j'ai souffert hier grâce à lui. Et qu'il sache que je resterai éternellement fidèle à la parole une fois donnée, malgré ses infidélités et ses

traliisons. Je serai je deviendrai le chemin de son

bonheur pour toute sa vie 1 pour toute sa vie ! Voilà ma décision. Ivan Fédorovitch l'approuve hautement.

Elle étouffait. Peut-être aurait-elle voulu parler avec plus de dignité, plus de naturel. Elle s'était exprimée avec trop de précipitation, sans adresse. C'était chez elle comme une satisfaction d'orgueil qu'elle avait cherchée pour se

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