l’appelleriez tous ! Mais à ma voix il sera sur pied. Ici, Carillon ! »
Le chien se dressa, se mit à gambader avec des cris de joie. Le capitaine accourut avec un morceau de bouilli.
« Il n’est pas chaud ? s’informa aussitôt Kolia d’un air entendu. Non ; c’est bien, car les chiens n’aiment pas le chaud. Regardez tous ; Ilioucha, regarde donc, vieux, à quoi penses-tu ? C’est pour lui que je l’ai amené, et il ne regarde pas ! »
Le nouveau tour consistait à mettre un morceau de viande sur le museau tendu du chien immobile. La malheureuse bête devait le garder aussi longtemps qu’il plaisait à son maître, fût-ce une demi-heure. L’épreuve de Carillon ne dura qu’une courte minute.
« Pille ! » cria Kolia, et, en un clin d’œil, le morceau passa du museau de Carillon dans sa gueule.
Le public, bien entendu, exprima une vive admiration.
« Est-il possible que vous ayez tant tardé uniquement pour dresser le chien ? s’exclama Aliocha d’un ton de reproche involontaire.
— Tout juste, s’écria Kolia avec ingénuité. Je voulais le montrer dans tout son éclat.
— Carillon ! Carillon ! cria Ilioucha en faisant claquer ses doigts frêles, pour attirer le chien.
— À quoi bon ! Qu’il saute plutôt lui-même sur ton lit. Ici, Carillon ! »
Kolia frappa sur le lit et Carillon s’élança comme une flèche vers Ilioucha. Celui-ci prit la tête à deux mains, en échange de quoi Carillon lui lécha aussitôt la joue. Ilioucha se serra contre lui, s’étendit sur le lit, se cacha la figure dans la toison épaisse.
« Mon Dieu, mon Dieu ! » s’exclama le capitaine.
Kolia s’assit de nouveau sur le lit d’Ilioucha.
« Ilioucha, je vais te montrer encore quelque chose. Je t’ai apporté un petit canon. Te souviens-tu, je t’en ai parlé une fois et tu m’as dit : « Ah ! comme je voudrais le voir ! » Eh bien ! je l’ai apporté. »
Et Kolia tira à la hâte de son sac le petit canon de bronze. Il se dépêchait parce qu’il était lui-même très heureux. Une autre fois, il eût attendu que l’effet produit par Carillon fût passé, mais maintenant il se hâtait, au mépris de toute retenue : « Vous êtes déjà heureux, eh bien, voilà encore du bonheur ! » Lui-même était ravi.
« Il y a longtemps que je lorgnais ceci chez le fonctionnaire