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et tu aurais tenu ta parole, car chez toi, la parole et l’action se valent. Tandis que moi, moi !… Sais-tu ? jusqu’à ce jour, je n’avais pas compris toute l’étendue du sacrifice que tu aurais fait en m’épousant. Pourtant, avec moi, tu risquais de mourir de faim ! Mais il me semblait que rien n’est comparable à l’honneur d’épouser un grand poète… en herbe, il est vrai ! Je n’ai pas voulu comprendre le motif que tu faisais valoir en retardant notre mariage. Je te faisais souffrir, je te martyrisais, je t’adressais des reproches, je te méprisais et finalement je te menaçais de ce billet… Je n’étais à ce moment pas même un misérable, mais simplement un être abject ! Oh ! combien tu devais me mépriser ! Non, il est bon que je meure ! Merci de n’avoir pas été à moi ! Les années auraient passé, et peut-être aurais-je fini par voir en toi un obstacle à mon avenir… Tout est mieux ainsi… À présent mes larmes amères ont purifié du moins mon cœur. Ah ! Zina, accorde-moi seule-