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vêtu et enveloppé de la tête aux pieds ; comme lui, il marchait sur le trottoir de la Fonlanka, d’un petit pas pressé, légèrement cadencé.

« Qu’est cela ? Qu’est cela ? » chuchota M. Goliadkine, souriant avec méfiance. Pourtant il tressaillit de tout son corps. Un frisson parcourut son dos. À ce moment le passant disparut tout à fait ; déjà on n’entendait plus ses pas.

Et M. Goliadkine restait toujours au même endroit et regardait derrière lui. Il se ressaisit pourtant peu à peu. « Mais qu’est-ce donc que cela ?… pensa-t-il avec dépit. Qu’est-ce donc que cela ? suis-je devenu fou ? » Il se retourna et poursuivit son chemin accélérant de plus en plus le pas et tâchant de ne penser à rien. Il ferma même les yeux. Tout à coup, à travers les hurlements du vent et le bruit de la tempête, un bruit nouveau de pas rapprochés vint à ses oreilles. Il tressaillit et ouvrit les yeux. Devant lui, à vingt pas, la tache noire d’un petit homme s’avançait rapidement. Cet homme se hâtait, se hâtait. La distance diminuait. M. Goliadkine pouvait déjà examiner à son aise son nouveau compagnon de l’heure tardive. Il eut un cri d’étonnement et d’horreur. Ses jambes fléchirent. C’était le même passant qui l’avait croisé dix minutes auparavant, et qui, brusquement, à l’improviste, réapparaissait devant lui.

Mais ce n’était pas là le seul prodige dont