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définitivement à revenir. « Il vaut mieux que je retourne, là-bas… c’est-à-dire… non… je serai… je serai un étranger qui observe, simplement. Mais oui, je suis un observateur, un étranger, et voilà. Ainsi, quoi qu’il arrive je n’y serai pour rien… voilà… voilà, il en sera ainsi. »

Cette décision prise il revint en effet. D’autant mieux que, grâce à cette heureuse idée, il pouvait se considérer comme étranger à tout. Cela vaut mieux. On n’a pas de responsabilité et l’on voit ce qu’il faut voir, voilà. C’était le meilleur calcul.

Ainsi tranquillisé, il s’abrita de nouveau derrière le tas de bois protecteur et regarda attentivement les fenêtres.

Il ne regarda ni n’attendit longtemps. Soudain derrière toutes ces fenêtres à la fois, ce fut une agitation étrange. À travers les rideaux écartés, des figures apparurent, des groupes serrés se pressèrent. Tous s’avançaient pour regarder dans la cour. Caché derrière son tas de bois, M. Goliadkine à son tour suivit ces mouvements avec intérêt. Il allongeait curieusement la tête à droite et à gauche, sans dépasser cependant l’ombre étroite du tas de bois qui le protégeait. Soudain il tressaillit de peur et faillit tomber à la renverse. Il lui sembla, — bientôt il en fut certain — que l’on ne musardait pas aux fenêtres, mais qu’on le cherchait tout simplement, lui, M. Goliadkine. Chacun regar-