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— Moi, mon ami… je suis M. Goliadkine… employé… le conseiller titulaire Goliadkine. C’est pour des explications.

— Attendez, il faut attendre un moment.

— Mon ami, impossible d’attendre. Mon affaire est sérieuse, impossible de la remettre.

— Mais de la part de qui venez-vous ? Vous apportez des papiers ?

— Non, mon ami, je viens de ma part. Annonce, mon ami, écoute… voici… c’est pour explications. Je te récompenserai, mon brave.

— Impossible, il nous est défendu de recevoir. Il y a du monde. Venez à dix heures du matin.

— Annoncez-moi, mon ami, impossible d’attendre, vous serez responsable, mon cher.

— Mais va donc annoncer. As-tu peur d’user tes chaussures, quoi ? fit un autre laquais, étendu sur un banc, et qui, jusque-là, n’avait dit mot.

— Mes chaussures… ? Tu sais qu’il est défendu de recevoir. Ils ont leur tour dans la matinée.

— Annonce donc, on ne te coupera pas la langue.

— J’annoncerai ; seulement c’est défendu ; tu sais qu’il nous a défendu. Entrez, monsieur.

M. Goliadkine entra dans la première chambre. Une pendule était sur la table. Il regarda l’heure. Il était huit heures et demie. Son cœur s’angoissa. Au même instant le larbin, du seuil de la chambre suivante, annonça M. Goliadkine.