Page:Dostoïevski - Le Double, 1919.djvu/201

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

endroit public, et réprouvées en société, surtout dans la bonne société.

— Comme vous voudrez, répondit froidement M. Goliadkine jeune qui avait deviné la pensée de M. Goliadkine aîné.

Il posa sur la table sa tasse qu’il avait vidée avec une indécente avidité.

— Au reste, je n’ai pas beaucoup de temps pour causer. Comment allez-vous, Iakov Pétrovitch ?

— Je ne puis vous dire qu’une chose, Iakov Pétrovitch, répondit M. Goliadkine avec calme et dignité, c’est que je n’ai jamais été votre ennemi.

— Hum ! Et Pétrouchka ? c’est bien Pétrouchka ? Comment va-t-il ? Comme toujours ?

— Comme toujours, lui aussi, répondit M. Goliadkine aîné un peu étonné. Je ne sais comment vous dire, Iakov Pétrovitch. De mon côté, qui est le bon côté, le côté honnête, convenez en, Iakov Pétrovitch…

— Oui. Mais vous savez vous-même, répondit M. Goliadkine cadet d’une voix calme et expressive et jouant l’homme attristé et digne, pris de repentir et de compassion, vous savez vous-même que les temps sont durs. Je vous prends à témoin, Iakov Pétrovitch, vous êtes un homme intelligent, ajouta-t-il en lâche flatterie. La vie n’est pas un jouet, vous le savez, Iakov Pétrovitch, conclut avec importance M. Goliad-