Page:Dostoïevski - Le Double, 1919.djvu/193

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

veillant est pour moi comme un père… Et puis… et puis… un chef bienfaisant… Le jeune homme a besoin de servir… Secourez-moi, Anton Antonovitch, défendez-moi, Anton Antonovitch… Je ne… rien… Anton Antonovitch, au nom de Dieu, encore un mot, Anton Antonovitch…

Mais Anton Antonovitch était déjà loin… M. Goliadkine ne savait plus où il était. Qu’avait-il entendu ? Que faisait-il là et qu’allait-il devenir ? Que ferait-on de lui ?…

Une supplication dans les yeux, il cherchait Anton Antonovitch parmi les employés, afin de se disculper encore et de se dévoiler à lui par de nobles et justes paroles.

… Au reste peu à peu la confusion de M. Goliadkine s’éclaira d’une lumière nouvelle, terrible, dans laquelle surgit toute une perspective de circonstances insoupçonnées… On heurta M. Goliadkine. Il se retourna. Devant lui était Pissarenko.

— Une lettre… monsieur…

— Ah ! tu as déjà fait la course, mon brave ?

— Non, on l’a apportée ici à dix heures du matin. Mikhéiev l’a apportée de la part de Vakhrameiev.

— C’est bien mon ami, c’est bien… je te récompenserai mon brave.

M. Goliadkine mit la lettre dans la poche de son uniforme, qu’il boutonna soigneusement. Il s’aperçut alors, à son grand étonnement,