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de Pétrouchka ; son odeur même s’était évanouie. Certainement, le lit était fait depuis longtemps. Ses bottes n’étaient pas là. Donc Pétrouchka était sorti. M. Goliadkine courut à la porte. Elle était fermée… Mais où est Pétrouchka ? marmotta-t-il, ému terriblement, un frisson par les membres.

Tout à coup une idée traversa sa tête… M. Goliadkine se précipita dans son bureau, examina, fouilla partout : la lettre qu’il avait écrite la veille à Vakhrameiev n’y était plus… Pétrouchka était absent. La pendule marquait une heure. La lettre qu’il avait reçue de Vakhrameiev portait de nouvelles annotations, très obscures à première vue, mais dont le sens s’expliquait maintenant. Pétrouchka avait été séduit, c’était de toute évidence. Il n’y avait aucun doute.

« Voilà donc le nœud principal de l’intrigue », s’écria M. Goliadkine en se frappant le front, et les yeux plus large ouverts. « C’est donc dans le repaire de cette astucieuse Allemande que gît maintenant le mauvais esprit. Ainsi c’était une diversion stratégique quand elle me parlait du pont Ismailowsky. Elle me bernait, elle me confondait, sorcière maudite, elle tendait le piège. C’est ça… si on envisage les choses à ce point de vue, c’est ça. Et l’apparition de l’autre canaille s’explique parfaitement. Le tout se tient. Il y a longtemps qu’ils l’avaient, qu’ils me le desti-