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sur son divan. Une lumière nouvelle perçait le brouillard vague et ténébreux qui l’entourait depuis deux jours déjà. Il commençait à comprendre. Il essaya de se lever, de faire le tour de sa chambre, pour éclaircir et rassembler ses idées dispersées, pour diriger et concentrer sa pensée, pour réfléchir de sang-froid à sa situation. Mais il retomba sans forces sur le divan.

« Évidemment je pressentais tout, mais pourquoi m’écrit-il ainsi ? et quel est le sens véritable de ses paroles ? A supposer que je le découvre, où cela me mènera-t-il ? Mais quelle tournure désagréable prend l’affaire ! Ah ! que demain arrive et que l’affaire s’éclaircisse. Je sais maintenant ce que je dois faire. Je dirai ceci, et cela… Je ne vends pas mon honneur… Mais lui, cette personne, comment s’est-elle mêlée à tout ça ? pourquoi s’est-elle introduite ici ? Ah ! que demain arrive… bien vite !… Il intrigue contre moi ! Il travaille contre moi ! Mais surtout ne perdons pas de temps. Tout de suite… écrire une lettre… déclarer que j’accorde… que je consens à tout… et l’envoyer demain de bonne heure… et aussi aller chez eux et les prévenir… Ils me calomnieront. »

M. Goliadkine approcha le papier, prit la plume et écrivit la lettre suivante en réponse à celle du fonctionnaire Vakhrameiev.