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Je ne me fâche pas… Moi-même, mon ami, j’ai bu aujourd’hui… Avoue, rappelle-toi, mon ami… As-tu été chez le fonctionnaire Vakhrameiev ?

— Eh bien… pour ça… pour ce qui est de ça… j’y ai été… sûr…

— C’est très bien, Pétrouchka, d’y être allé… Tu vois que je ne me fâche pas…

Il continua, flattant son domestique, lui tapant amicalement sur l’épaule, lui souriant :

— Eh bien, tu as bu… coquin ? Mais ça ne fait rien… Je ne me fâche pas, tu vois que je ne me fâche pas…

— Non, s’il vous plaît, je ne suis pas un coquin. Je suis seulement allé chez de braves gens. Je ne suis pas un coquin et je ne l’ai jamais été…

— Mais non, Pétrouchka. Écoute-moi, Pierre… Ça n’a pas d’importance… Ce n’est pas pour t’injurier, c’est pour plaisanter… c’est pour rire que je t’appelle coquin. C’est un mot d’amitié, Pétrouchka. Ça veux dire qu’un homme n’est pas bête, qu’on ne peut pas le tromper… C’est un mot flatteur… Mais ça n’a pas d’importance… Voyons, dis-moi, maintenant, Pétrouchka, sans rien me cacher, franchement, comme à un ami… Es-tu allé chez le fonctionnaire Vakhrameiev et t’a-t-il donné l’adresse ?

— Oui, il m’a donné l’adresse. C’est un brave fonctionnaire. Et ton maître, m’a-t-il dit, est un