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— Du masque ?

— C’est-à-dire… je crains que vous n’interprétiez encore mal le sens de mes paroles. Nous sommes du même avis, Anton Antonovitch, je veux seulement développer cette idée que les hommes qui portent le masque ne sont pas rares aujourd’hui, et que sous le masque il est difficile de reconnaître un homme.

— Mais non, vous savez ce n’est pas si difficile que ça, c’est parfois même très facile, et souvent il ne faut pas chercher bien loin pour trouver.

— Non, voyez-vous, Anton Antonovitch, je parle pour moi. Moi, par exemple, je porte le masque quand il convient, au carnaval, dans les réunions gaies. Mais je ne porte pas le masque au figuré, chaque jour, devant les hommes. C’est cela que j’ai voulu dire, Anton Antonovitch.

— Non, en attendant laissons cela, je n’ai pas le temps, dit Anton Antonovitch qui se leva et ramassa quelques paperasses pour aller faire son rapport à Son Excellence, et votre affaire ne tardera pas à s’expliquer. Vous verrez vous-même qui vous accuse et contre qui vous aurez à vous défendre, et enfin je vous prie respectueusement de m’épargner les explications et bavardages privés qui sont nuisibles au service…

— Non, Anton Antonovitch, moi,…commença Goliadkine qui pâlissait légèrement, derrière