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maison. Nous restions dans l’attente. La nuit passa. Encore une nuit d’orage ; et le trouble envahissait mon âme. J’ouvris ma fenêtre. Mon visage brûlait, mes yeux étaient pleins de larmes, mon cœur était en feu. J’étais tout entière comme un brasier ; j’avais envie de m’en aller loin, au bout du monde, là où naît l’orage. Ma poitrine se gonflait… Tout à coup, très tard, je dormais, ou plutôt j’étais dans une sorte de demi-sommeil, quand j’entendis frapper à ma fenêtre : « Ouvre ! » Je regarde… Un homme est monté jusqu’à ma fenêtre à l’aide d’une corde. Je le reconnus aussitôt. J’ouvris ma fenêtre et le laissai entrer dans ma chambre. C’était lui ! Il n’enleva pas son bonnet. Il s’assit sur un banc, tout essoufflé, pouvant à peine respirer, comme s’il avait été poursuivi. Je me mis dans un coin. Je me sentais pâlir…

» Le père est à la maison ? » « Oui. » « Et la mère ? » « La mère aussi. » « Tais-toi, maintenant. Tu entends ? » « J’entends. » « Quoi ? » « Le vent sous la fenêtre. » « Eh bien, ma belle, veux-tu tuer ton ennemi, appeler ton père et perdre mon âme ? Je me soumets à ta volonté. Voici une corde ; lie-moi si le cœur te dit de venger ton offense. » Je me taisais. « Eh bien quoi ! parle, ma joie. » « Que faut-il ?… » « Il