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– Oui, oui, donne-moi à boire, dit Ordynov d’une voix éteinte.

Il se leva. Il était encore très faible. Un frisson lui parcourut le dos ; tous ses membres étaient endoloris et comme brisés. Mais dans son cœur il faisait clair et les rayons du soleil paraissaient l’animer d’une sorte de joie solennelle. Il sentait qu’une nouvelle vie forte, invisible, commençait pour lui. La tête lui tournait légèrement.

– On t’appelle Vassili ? demanda-t-elle. J’ai peut-être mal entendu, mais il me semble que le patron t’a nommé ainsi, hier.

– Oui, Vassili. Et toi, comment t’appelles-tu ? dit Ordynov en s’approchant d’elle et se tenant à peine sur ses jambes.

Il trébucha, elle le retint par le bras et rit :

– Moi ? Catherine, dit-elle en fixant dans les siens ses grands yeux bleus et clairs.

Ils se tenaient par la main.

– Tu veux me dire quelque chose ? fit-elle enfin.

– Je ne sais pas, répondit Ordynov.

Sa vue s’obscurcissait.

– Tu vois comme tu es… Assez, mon pigeon, assez. Ne te tourmente pas. Assieds-toi ici, devant la table, en face du soleil. Reste ici bien tranquille et ne me suis pas, ajouta-t-elle, croyant que le jeune homme allait faire un