Page:Dostoïevski - La logeuse, suivi de deux histoires (2e édition), 1920.djvu/22

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le vieillard le regarda d’un air hostile et sévère. Elle aussi jeta un regard sur lui, mais sans curiosité, distraitement, comme si une autre pensée lointaine l’absorbait.

Ordynov les suivit sans même s’en rendre compte. Il faisait déjà nuit. Le vieillard et la jeune femme entrèrent dans une grande rue large, sale, pleine de petites boutiques diverses, de dépôts de farine, d’auberges, et qui menait tout droit hors de la ville. Dans cette rue, ils prirent une longue ruelle étroite, fermée de chaque côté par des palissades et que terminait l’énorme mur noirci d’une grande maison de quatre étages, dont l’autre issue donnait sur une grande rue populeuse. Ils étaient déjà près de la maison quand le vieillard, soudain, se retourna et jeta un regard impatient sur Ordynov. Le jeune homme s’arrêta net, surpris lui-même de sa conduite. Le vieillard se retourna pour la seconde fois, comme pour s’assurer si la menace avait produit son effet. Ensuite ils entrèrent tous deux, lui et la jeune femme, dans la cour de la maison.

Ordynov revint sur ses pas pour rentrer chez lui. Il était de fort mauvaise humeur. Il s’en voulait d’avoir perdu ainsi toute une journée, de s’être fatigué sans raison et surtout d’avoir commis la sottise de prendre pour une sorte d’aventure un incident plus que banal.