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dans le même logement de garçon, c’est évidemment une perspective assez incolore. Un être de plus, un homme paisible, c’était donc, vu les circonstances, un présent du ciel.

Agrafena n’avait pas menti. Mon locataire était bien l’homme qui a beaucoup vu. Son passeport mentionnait qu’il était soldat libéré ; mais, même sans le passeport, je l’eusse deviné au premier coup d’œil. C’est facile à reconnaître.

Astafi Ivanovitch, mon locataire, était un brave homme, et nous nous sommes tout de suite entendus. Ce qui, surtout, m’était agréable, c’est qu’Astafi Ivanovitch racontait très bien, surtout les aventures auxquelles il avait été directement mêlé. Dans ma pauvre et monotone existence, pareil narrateur était un trésor. Une fois, il me raconta précisément une de ces histoires ; et son récit produisit sur moi une réelle impression. Voici à quelle occasion il me la conta.

Un jour que j’étais seul dans l’appartement, Astafi et Agrafena sortis pour leurs affaires, j’entendis tout à coup, de ma chambre, que quelqu’un pénétrait dans l’entrée. C’était certainement un étranger. J’allai voir. En effet, il y avait quelqu’un dans l’antichambre, un homme trapu, en veston, malgré la température froide de l’automne.