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Ilitch regardait tantôt l’un, tantôt l’autre de ses visiteurs.

– Mais non, Monsieur, non, reprit Mourine en hochant la tête avec importance. Elle est ainsi ; sa tête est si folle qu’il faut toujours à son cœur un amoureux quelconque, son bien-aimé… Et moi, Monsieur, j’ai vu… pardonnez-moi mes paroles stupides… continua Mourine en saluant et essuyant sa barbe, j’ai vu comment elle allait chez vous, et que vous, Votre Seigneurie, vouliez unir votre sort au sien…

Iaroslav Ilitch devint pourpre et regarda Mourine avec reproche. Ordynov avait peine à se tenir sur sa chaise.

– Non, Monsieur… c’est-à-dire… ce n’est pas cela… Moi, Monsieur, je suis un simple paysan… Nous sommes vos serviteurs, ajouta-t-il en saluant très bas, et nous prierons Dieu pour vous, ma femme et moi. Quant à nous, que nous ayons de quoi manger, soyons bien portants, et nous sommes satisfaits… Vous le savez vous-même, Monsieur… Ayez pitié de nous. Parce que qu’arrivera-t-il, Monsieur, quand elle aura encore un amant ? Pardonnez-moi ce mot grossier… Vous êtes un gentilhomme, Votre Excellence, un jeune homme fier, ardent, tandis qu’elle, vous le savez, c’est une enfant, une enfant sans raison… le péché est