qui s’étendait devant la maison on voyait une rangée d’orangers, de citronniers et de jasmins plantés dans de grandes caisses de bois peintes en vert. Ces arbres, suivant Lébédeff, donnaient à sa propriété un aspect vraiment enchanteur. Quelques-uns se trouvaient déjà là lorsqu’il avait fait l’acquisition de l’immeuble ; charmé de l’effet qu’ils produisaient, il s’empressa d’en acheter d’autres pour les joindre aux premiers. Quand les caisses contenant ces végétaux exotiques eurent été amenées à la villa et mises en place, Lébédeff sortit à plusieurs reprises de chez lui pour aller dans la rue jouir du coup d’œil, et chaque fois il grossissait mentalement la somme qu’il comptait demander à son futur locataire.
Dans l’état d’affaissement physique et moral où le prince se trouvait, cette maison de campagne lui plut beaucoup. Du reste, le jour du départ pour Pavlovsk, c’est-à-dire le surlendemain de l’accès, il avait à peu près recouvré les apparences de la santé, quoique, en fait, il se sentît encore souffrant. Tous les visages qui l’entouraient depuis trois jours lui causaient une impression agréable : il était bien aise de voir, non-seulement Kolia, devenu son inséparable, mais toute la famille de Lébédeff (sauf le neveu, qui avait disparu de la maison) et Lébédeff lui-même. Ce fut aussi avec plaisir qu’avant de quitter Pétersbourg, il reçut la visite du général Ivolguine.
Il était déjà tard quand on arriva à Pavlovsk ; ce même jour, néanmoins, plusieurs personnes vinrent voir le prince et se réunirent sur la terrasse de la villa. Gania se présenta le premier. Le prince eut peine à le reconnaître, tant le jeune homme était changé et maigri. Ensuite se montrèrent Varia et Ptitzine, qui étaient aussi en villégiature dans la localité. Quant au général Ivolguine, il ne bougeait pour ainsi dire pas de chez Lébédeff et semblait avoir transféré en même temps que lui ses pénates à Pavlovsk. Lébédeff l’empêchait autant que possible d’approcher du prince et s’efforçait de le tenir près de lui ; l’employé parlait à Arda-