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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

critiques », deux « notes », trois autres notes « improvisées », un « à-propos » et enfin une « observation monitoire ». Dans cette dernière œuvre de polémique rédigée sous forme « d’observation à mes ennemis », elle s’amuse, sous prétexte de me protéger, à me houspiller de telle façon que je puis affirmer n’avoir rien lu de plus féroce dans les factums des plus enragés critiques. Et l’auteur veut que j’insère tout cela ! Je lui ai d’abord déclaré que je n’avais pas le moindre ennemi ; qu’il y avait du mirage dans son cas ; ensuite que les beaux temps du Citoyen de 1873 étaient passés (ah ! alors le pauvre journal recevait des paquets d’injures de tous les côtés), mais qu’à présent on me laissait tranquille ; enfin, que je saurais très bien répondre tout seul aux attaques, s’il s’en produisait jamais.

La « personne » se fâcha, me dit des choses désagréables, puis sortit, à mon grand plaisir. Cette « personne » est évidemment un homme malade. Un de ses articles inséré par nous renferme quelques détails biographiques sur le signataire. C’est « un homme attristé et qui s’attriste chaque jour davantage »… Mais ce qui m’effraie surtout, c’est la force de « volonté civique » déployée par ce collaborateur peu désiré. Dès les premiers mots qu’il m’adressa, je sus qu’il ne souhaitait aucune espèce d’honoraires, qu’il écrivait uniquement par « devoir civique ». Il avoua même que son désir de me défendre était accessoire, qu’il comptait surtout sur ma reconnaissance pour obtenir dans mon journal une sorte de concession perpétuelle, un espace à lui, où il pourrait à son aise exposer ses idées. Mais quelles peuvent bien être au juste ses idées ? Il écrit sur tout avec une égale férocité, contrastant avec un besoin d’attendrissement toujours inassouvi. « Il y a dans mon talent, déclara-t-il lui-même un jour dans un de ses articles, 99 p. 100 de fiel et 1 p. 100 de liquide lacrymal. ». Je crois, du reste, que tous les journaux ont été arrosés de sa prose ; à certain périodique il a envoyé jusqu’à quarante lettres pleines de conseils, de bons avis, sur tout et à propos de tout. Il faisait un cours complet de journalisme à l’usage des rédacteurs de cette feuille. Il fallait écrire sur ceci, né-