réveillent un peu depuis que Mac-Mahon vient d’ajourner les Chambres jusqu’aux nouvelles élections d’octobre, ils se proclament les « opprimés », les « victimes », et se sentent entourés d’une auréole de martyrs. Ils s’attendent à ce que toute la France entonne la Marseillaise et clame : « On assassine nos frères ! » le cri classique de toutes les révolutions parisiennes, qui précède immédiatement la ruée aux barricades. En tout cas ils espèrent que le pays va culbuter Mac-Mahon, cet usurpateur en herbe, et élire toute l’ancienne majorité républicaine. Alors la Chambre imposera son veto à Mac-Mahon, qui, effrayé des « droits légitimes » des républicains, se soumettra. Ils croient imperturbablement à leur « droit légitime ». Ils ont si longtemps souffert pour leur république bien-aimée ! À notre grand étonnement quelques journaux russes croient à leur triomphe prochain. Et pourtant si Mac-Mahon ne se soumet pas ! L’indignation « du pays » n’empêchera pas le maréchal de trouver des partisans fort nombreux, comme il arrive toujours en France, en pareil cas. Que faire ? Construire des barricades ? Mais avec les fusils et canons actuels, les barricades sont impossibles. Et je ne crois pas que la France veuille les élever, ces barricades. La France peut désirer la République, mais, lasse, exténuée, après le gâchis politique d’un siècle, elle regardera les choses à son point de vue plus prosaïque et se soumettra à la force. La force est maintenant du côté des « légions », et le pays le pressent. La question est de savoir pour qui, au juste, sont les « légions ».
II
Avant que le Maréchal lançât le manifeste dans lequel il parle des « légions » comme d’une force nouvelle, j’avais