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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

qui peut-on causer de la diplomatie ? C’est pourtant le thème intéressant, surtout aujourd’hui, mais…


II


LA DIPLOMATIE DEVANT LES QUESTIONS MONDIALES


La diplomatie est aussi un thème fort sérieux. Les gens sages affirment, en effet, que nous vivons dans un temps diplomatique par excellence, à une époque où toutes les questions qui intéressent les destinées du monde entier peuvent et doivent être résolues par la diplomatie. On m’avait pourtant laissé entendre qu’il y avait une guerre quelque part. Je l’avais bien cru aussi, mais on vient me dire maintenant qu’il y a malentendu, qu’il n’y a qu’une action diplomatique, accompagnée de promenades militaires excellentes pour les troupes. Je ne demande pas mieux que d’adopter cette nouvelle opinion, qui est très rassurante, mais je constate, d’autre part, que la question d’Orient passionne terriblement la Russie et toute l’Europe, par surcroît. Tout le monde sait depuis longtemps que la question d’Orient est une question immense, mondiale ; que de sa solution sortira une ère nouvelle ; qu’il s’agit là, non seulement de Russes et de Turcs, ou de vagues Bulgares, mais en même temps de toute l’Europe occidentale, aussi bien que de l’Europe orientale. Il est compréhensible que l’Europe s’agite et que la diplomatie ait du travail par-dessus la tête. Mais de quelle nature est l’ouvrage de la diplomatie ? Il est très clair que son œuvre consistera tout d’abord à escamoter la question d’Orient, à prouver, à tous ceux que cela intéresse, qu’il n’y a pas de question du tout, qu’il n’y en a jamais eue, qu’il n’y a jamais eu rien que de petites promenades militaires, que l’on nous raconte des plaisanteries vieilles de cent ans, des