Page:Dostoïevski - Journal d’un ecrivain.djvu/378

Cette page a été validée par deux contributeurs.
374
JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

qui sait si l’un des adolescents de la génération qui croît…

II


LA SATIRE RUSSE, — « LES TERRES VIERGES », — « LES DERNIÈRES CHANSONS », — VIEUX SOUVENIRS.


Ce mois-ci je me suis occupé de littérature et j’ai beaucoup lu. À ce propos je veux dire que j’ai rencontré récemment une singulière opinion française sur la satire russe. J’en ai oublié le texte exact, mais en voici le sens :

« La satire russe semble avoir peur de découvrir une bonne action à mettre à l’actif de la société russe. Si elle en trouve une, elle s’inquiète et ne reprend son calme que lorsqu’elle a su, en scrutant le possible et l’impossible, lui reconnaître enfin un motif malhonnête. Elle s’écrie alors triomphalement : Ce n’était pas le moins du monde une bonne action. Il y avait là-dessous quelque chose de très malpropre. »

Est-elle juste, cette opinion ? Je ne le crois pas. Je sais seulement que le genre satirique à, chez nous des représentants brillants et n’est pas sans vogue. Le public aime beaucoup la satire, mais il me paraît qu’il aime encore bien plus la beauté vraie, qu’il la veut et désire son règne. Le comte Léon Tolstoï est certainement l’écrivain le plus goûté du public russe de toutes nuances.

Notre satire, si brillante qu’elle soit, a le tort de demeurer un peu vague. Il est difficile, en effet, de définir son genre d’utilité. Beaucoup de gens, même, affirment qu’elle ne recèle aucuns « dessous ». Mais est-ce possible ? Au nom de quoi, en nom de qui, accuse-t-elle ? Nous restons tous assez perplexe : quand on soulève cette question.

J’ai lu les Terres Vierges de Tourguenev et en attends la seconde partie.