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la chambre, où Nelly s’était déjà glissée, et je pris encore une fois congé d’elle. Elle était horriblement agitée, son visage était blême ; je la quittai plein d’inquiétude.

— Quelle drôle de servante vous avez ! me dit le prince pendant que nous descendions. Cette petite fille est votre servante, n’est-ce pas ?

— Non… elle… demeure chez moi provisoirement.

— Une étrange petite fille ! Elle m’a fait l’effet d’une folle. Figurez-vous qu’elle m’a d’abord répondu raisonnablement ; mais ensuite, après m’avoir regardé, elle s’est jetée contre moi, s’est mise à crier, à trembler, elle s’est accrochée à moi… elle semblait vouloir dire quelque chose. J’ai été effrayé et j’allais prendre la fuite lorsque, grâce à Dieu, elle s’est enfuie elle-même. J’étais tout ahuri. Comment vous accommodez-vous de cela ?

— Elle est malade, elle a des attaques d’épilepsie.

— Dans ce cas, c’est moins étonnant…

Il me vint l’idée que la visite de Masloboïew, la veille, celle que je lui avais faite le jour même, le récit qu’il m’avait débité étant ivre et à son corps défendant, ses efforts pour me persuader de ne pas le croire malintentionné à mon égard et, enfin, la visite du prince m’attendant pendant deux heures et me sachant peut-être chez Masloboïew, tandis que Nelly s’enfuyait d’auprès de lui jusque dans la rue, il me vint l’idée, dis-je, que tout cela avait un lien, un rapport quelconque. Il y avait là de quoi réfléchir.

La voiture du prince l’attendait à la porte. Nous y montâmes et nous partîmes.



VIII

Nous n’avions pas loin à aller. Nous gardâmes le silence une minute, et je pensais à la manière dont il entamerait la conversation. Il me semblait qu’il voudrait me sonder, me faire causer ; mais il aborda tout droit la question.

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