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cette porte fermée à la clef. À côté se trouve une chaise, la seule qu’il y ait dans les deux pièces. C’est moi qui l’ai apportée de mon logement, pour écouter dans des conditions plus confortables. La table de Sophie Séménovna est placée juste derrière cette porte. La jeune fille était assise là et causait avec Rodion Romanovitch, tandis qu’ici, sur ma chaise, je prêtais l’oreille à leur conversation. Je suis resté à cette place deux soirs de suite, et chaque fois pendant deux heures. J’ai donc pu apprendre quelque chose ; qu’en pensez-vous ?

— Vous étiez aux écoutes ?

— Oui ; maintenant rentrons chez moi ; ici l’on ne peut même pas s’asseoir.

Il ramena Avdotia Romanovna dans sa première chambre qui lui servait de « salle » et offrit à la jeune fille un siège près de la table. Quant à lui, il prit place à distance respectueuse, mais ses yeux brillaient probablement du même feu qui naguère avait tant effrayé Dounetchka. Celle-ci frissonna, malgré l’assurance qu’elle s’efforçait de montrer, et promena de nouveau un regard défiant autour d’elle. La situation isolée du logement de Svidrigaïloff finit par attirer son attention. Elle voulut demander si, du moins, la propriétaire était chez elle, mais sa fierté ne lui permit pas de formuler cette question. D’ailleurs, l’inquiétude relative à sa sûreté personnelle n’était rien au prix de l’autre anxiété qui torturait son cœur.

— Voici votre lettre, commença-t-elle en la déposant sur la table. Ce que vous m’avez écrit est-il possible ? Vous laissez entendre que mon frère aurait commis un crime. Vos insinuations sont trop claires, n’essayez pas maintenant de recourir à des subterfuges. Sachez qu’avant vos prétendues révélations j’avais déjà entendu parler de ce conte absurde dont je ne crois pas un mot. L’odieux ici ne le cède qu’au ridicule. Ces soupçons me sont connus, et je n’ignore pas non plus ce qui les a fait naître. Vous ne pouvez avoir aucune