regard autour de lui et tâta de nouveau sa hache. « Ne suis-je point trop pâle ? pensa-t-il, — n’ai-je pas l’air trop agité ? Elle est défiante… Si j’attendais encore un peu… pour laisser à mon émotion le temps de se calmer ?… »
Mais, loin de s’atténuer, les pulsations de son cœur devenaient de plus en plus violentes… Il n’y put tenir davantage, et, avançant lentement la main vers le cordon de la sonnette, il le tira à lui. Au bout d’une demi-minute, il sonna de nouveau, cette fois un peu plus fort.
Pas de réponse. Carillonner comme un sourd eut été inutile, maladroit même. À coup sûr, la vieille était chez elle ; mais, naturellement soupçonneuse, elle devait l’être d’autant plus en ce moment qu’elle se trouvait seule. Raskolnikoff connaissait en partie les habitudes d’Aléna Ivanovna. Et, derechef, il appliqua son oreille contre la porte. La circonstance avait-elle développé chez lui une acuité particulière de sensation (ce qui, en général, est difficile à admettre), ou bien, en effet, le bruit était-il aisément perceptible ?
Quoi qu’il en soit, son ouïe distingua soudain qu’une main se posait avec précaution sur le bouton de la serrure et qu’une robe frôlait la porte. Quelqu’un, à l’intérieur, se livrait exactement au même manège que lui sur le palier. Quelqu’un, debout près de la serrure, écoutait en s’efforçant de dissimuler sa présence, et probablement aussi avait l’oreille collée contre la porte.
Ne voulant pas avoir l’air de se cacher, le jeune homme fit exprès de remuer quelque peu bruyamment et de grommeler assez haut ; puis il sonna pour la troisième fois, mais doucement, posément, sans que son coup de sonnette trahit la moindre impatience. Cette minute laissa à Raskolnikoff un souvenir ineffaçable. Quand, plus tard, il y songeait, jamais il ne parvenait à comprendre comment il avait pu déployer tant de ruse, alors surtout que l’émotion le trou-