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Raskolnikoff se souleva avec effort. Il avait mal à la tête. Il se mit debout, fit un tour dans sa chambre, puis se laissa de nouveau tomber sur le divan.

— Encore ! cria Nastasia, mais tu es donc malade ?

Il ne répondit pas.

— Veux-tu du thé ?

— Plus tard, articula-t-il péniblement ; après quoi, il ferma les yeux et se tourna du côté du mur. Nastasia, debout au-dessus de lui, le contempla pendant quelque temps.

— Au fait, il est peut-être malade, dit-elle avant de se retirer.

À deux heures, elle revint avec de la soupe. Elle trouva Raskolnikoff toujours couché sur le divan. Il n’avait pas touché au thé. La servante se fâcha et se mit à secouer violemment le locataire.

— Qu’as-tu donc à dormir ainsi ? gronda-t-elle en le regardant d’un air de mépris.

Il se mit sur son séant, mais ne répondit pas un mot et resta les yeux fixés à terre.

— Es-tu malade ou ne l’es-tu pas ? demanda Nastasia.

Cette seconde question n’obtint pas plus de réponse que la première.

— Tu devrais sortir, dit-elle après un silence ; le grand air te ferait du bien. Tu vas manger, n’est-ce pas ?

— Plus tard, répondit-il d’une voix faible ; — va-t’en ! Et il la congédia du geste.

Elle resta encore un moment, le considéra avec une expression de pitié et finit par sortir.

Au bout de quelques minutes, il leva les yeux, examina longuement le thé et la soupe, et commença à manger.

Il avala trois ou quatre cuillerées sans appétit, presque machinalement. Son mal de tête s’était un peu calmé. Quand il eut terminé son léger repas, il s’étendit de nouveau sur le divan, mais il ne put se rendormir et resta immobile,