à cette démarche que sous l’influence de la peur. Mais laissons Douchkine poursuivre son récit : — « Ce paysan qui s’appelle Nikolaï Démentieff, je le connais depuis l’enfance : il est, comme moi, du gouvernement de Riazan et du district de Zaraïsk. Sans être un ivrogne, il boit quelquefois un peu trop.
« Nous savions qu’il faisait des travaux de peinture dans cette maison avec Mitréi, qui est de son pays. Après avoir reçu le petit billet, Nikolaï a bu coup sur coup deux verres, échangé son rouble pour payer et est parti en emportant la monnaie. Je n’ai pas vu Mitréi avec lui à cette heure-là. Le lendemain, nous avons entendu dire qu’on avait tué à coups de hache Aléna Ivanovna et sa sœur Élisabeth Ivanovna. Nous les connaissions, et alors un doute m’est venu au sujet des boucles d’oreilles, parce que nous savions que la vieille prêtait de l’argent sur des objets de ce genre. Pour éclaircir mes soupçons, je me suis rendu dans cette maison sans faire semblant de rien, et tout d’abord j’ai demandé si Nikolaï était là. Mitréi m’a répondu que son camarade faisait la noce : Nikolaï était rentré chez lui, ivre, à la première heure du jour, et au bout de dix minutes environ il était sorti de nouveau ; depuis ce temps, Mitréi ne l’avait plus vu, et il achevait seul le travail.
« L’escalier qui conduit chez les victimes dessert aussi le logement où travaillent les deux ouvriers, ce logement est situé au second étage. Ayant appris tout cela, je n’ai rien dit à personne », — c’est Douchkine qui parle, — « mais j’ai recueilli le plus de renseignements possible sur les circonstances de l’assassinat, et je suis revenu chez moi, toujours préoccupé du même doute. Or, ce matin, à huit heures », — c’est-à-dire le surlendemain du crime, tu comprends ? — « je vois Nikolaï entrer dans mon établissement ; il avait bu, mais il n’était pas trop ivre et pouvait comprendre ce qu’on lui disait. Il s’assied en silence sur un banc.