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Prascovia Ilinitchna vit avec eux et fait ses délices de leur consentement. C’est toujours elle qui tient la maison. Peu de temps après le mariage de mon oncle, M. Bakhtchéiev lui avait offert sa main, mais elle avait refusé carrément. On en avait conclu qu’elle allait se retirer dans un couvent ; mais cette supposition ne se réalisa pas. Prascovia possède une singulière propriété de caractère : elle ne peut que s’anéantir devant ceux qu’elle aime, elle les mange des yeux, plie devant leurs moindres caprices, les suit pas à pas et les sert. Depuis la mort de sa mère, elle considéra que son devoir était de rester avec son frère et tout faire pour contenter Nastenka.

Le vieux Éjévikine est encore en vie et, depuis ces derniers temps, il fréquente de plus en plus sa fille ; mais, au commencement, il désolait mon oncle par le soin qu’il apportait à écarter de Stépantchikovo et sa personne et sa marmaille (c’est ainsi qu’il qualifiait ses enfants). Les invitations de mon oncle n’avaient aucune prise sur lui : c’est un homme aussi fier que susceptible, et cette susceptibilité a même quelque chose de maladif.

À cette seule pensée que, pauvre, il serait reçu par générosité dans une riche maison, qu’il pourrait être considéré comme un importun, il s’affo-