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accompli et irrévocable et que tout cela était l’ouvrage de Foma Fomitch.

Cinq minutes ne s’étaient pas écoulées que l’on vit apparaître Tatiana Ivanovna. Quel instinct, quel flair l’avertit aussi rapidement, au fond de sa chambre, de ces événements d’amour et de mariage ? Elle entra, légère, le visage rayonnant et les yeux mouillés de larmes joyeuses, vêtue d’une ravissante toilette (elle avait eu le temps d’en changer !) et se précipita pour embrasser Nastenka.

— Nastenka ! Nastenka ! Tu l’aimais et je ne le savais pas ! Mon Dieu ! ils s’aimaient, ils souffraient en silence, en secret ! On les persécutait ! Quel roman ! Nastia, mon ange, dis-moi toute la vérité, aimes-tu vraiment ce fou ?

Pour toute réponse Nastia l’embrassa.

— Dieu ! quel charmant roman ! et Tatiana battit des mains. Écoute, Nastia, mon ange, tous les hommes, sans exception, sont des ingrats, des méchants qui ne valent pas notre amour. Mais peut-être celui-ci est-il meilleur que les autres. Approche-toi, mon fou ! s’écria-t-elle en s’adressant à mon oncle. Tu es donc vraiment amoureux ? Tu es donc capable d’aimer ? Regarde-moi, je veux voir tes yeux, savoir s’ils sont menteurs ? Non, non ! ils ne mentent pas, ils reflètent bien l’amour !