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— Oh ! il n’est pas tard, mais notre Dulcinée n’a pas attendu le jour pour filer à l’anglaise. Lève-toi, nous allons courir après elle !

— Quelle Dulcinée ?

— Mais notre seule Dulcinée, l’innocente ! Elle s’est sauvée avant le jour ! Je ne crois venir que pour un instant, le temps de vous éveiller, mon petit père, et il faut que ça me prenne deux heures ! Levez-vous, votre oncle vous attend. En voilà une histoire !

Il parlait d’une voix irritée et malveillante.

— De quoi et de qui parlez-vous ? demandai-je avec impatience, mais commençant déjà à deviner ce dont il s’agissait. Ne serait-il pas question de Tatiana Ivanovna ?

— Mais sans doute, il s’agit d’elle ! Je l’avais bien dit et prédit : on ne voulait pas m’entendre. Elle nous a souhaité une bonne fête ! Elle est folle d’amour. L’amour lui tient toute la tête ! Fi donc ! Et lui, qu’en dire avec sa barbiche...

— Serait-ce Mizintchikov ?

— Le diable t’emporte ! Allons, mon petit père, frotte-toi les yeux et tâche de cuver ton vin, ne fût-ce qu’en l’honneur de cette fête. Il faut croire que tu t’en es donné hier à souper, pour que ce ne soit pas encore passé. Quel Mizintchikov ? Il s’agit