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— Un peu trop, m’écriai-je soudainement enflammé. Il se peut que tantôt j’aie dépassé la mesure et que j’aie ainsi autorisé l’assistance à me condamner. Je comprends fort bien que j’aie assez mal réussi, et il était inutile de me le dire. Je sais aussi que ce n’est pas ainsi que l’on agit dans le monde, mais, réfléchissez et dites-moi s’il y avait moyen de ne pas s’emporter ! Mais on se croirait dans une maison d’aliénés, si vous voulez savoir ce que j’en pense !… et… et je m’en vais ; voilà tout !

— Fumez-vous ? s’enquit placidement Mizintchikov.

— Oui.

— Alors, vous me permettrez d’allumer ma cigarette. Là-bas, il est interdit de fumer et je commençais à m’ennuyer sérieusement. Je conviens que ça ne ressemble pas mal à un asile d’aliénés ; mais soyez sûr que je ne me permettrai pas de vous juger, car, à votre place, je me serais peut-être emporté deux fois plus fort.

— En ce cas, comment avez-vous pu conserver ce calme imperturbable, si vous étiez tellement révolté ? Je vous vois encore impassible et je vous avoue qu’il m’a semblé singulier que vous vous désintéressiez ainsi de la défense du