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besoin de toi. Puis, s’adressant à moi : — Mon ami, me dit-il, il me semble que je me suis un peu emballé. Toute chose doit être faite avec dignité, avec courage, mais sans cris, sans insultes. C’est cela ! Dis-moi, Sérioja, ne trouverais-tu pas préférable de t’éloigner un moment ? Cela t’est sans doute égal ? Je te raconterai après tout ce qu’il se sera passé, hein ? Qu’en penses-tu ? Fais-le pour moi.

Je le regardai fixement et je dis :

— Vous avez peur, mon oncle ! Vous avez des remords.

— Non, mon ami, je n’ai pas de remords ! s’écria-t-il avec beaucoup de fougue. Je ne crains plus rien. Mes résolutions sont fermement prises. Tu ne sais pas, tu ne peux t’imaginer ce qu’ils viennent d’exiger de moi. Pouvais-je consentir ? Non et je le leur prouverai. Je me suis révolté. Il fallait bien que le jour arrivât où je leur montrerais mon énergie. Mais, sais-tu, mon ami, je regrette de t’avoir fait demander. Il sera pénible à Foma de t’avoir pour témoin de son humiliation. Vois-tu, je voudrais le renvoyer d’une façon délicate, sans l’abaisser. Mais ce n’est qu’une manière de parler ; j’aurai beau envelopper mes paroles les plus adoucies, il n’en sera pas moins humilié ! Je