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tête sans remords ! » Ça le fit rire. Il me présenta à ces dames après le spectacle et il avait dû raconter l’histoire, le polisson, car elles riaient beaucoup. Jamais je n’ai passé une aussi bonne soirée. Voilà, Foma, ce qu’il peut nous arriver ! Ha ! ha ! ha !

Mais mon pauvre oncle riait en vain ; en vain promenait-il autour de lui son regard bon et gai. Son amusante histoire fut accueillie par un silence de mort. Foma Fomitch se taisait tristement et les autres l’imitaient. Seul, Obnoskine souriait en prévision de la mercuriale qui attendait mon oncle. Yégor Ilitch rougit et se troubla. C’était tout ce qu’attendait Foma.

— Avez-vous fini ? demanda-t-il enfin au conteur sur un ton fort austère.

— J’ai fini, Foma.

— Et vous êtes content ?

— Comment, content ? Que veux-tu dire ? fit mon oncle avec anxiété.

— Vous sentez-vous soulagé, à présent ? Êtes-vous satisfait d’avoir interrompu l’entretien intéressant et littéraire de vos amis pour contenter votre mesquin amour-propre ?

— Mais voyons, Foma, je voulais vous amuser, et toi...