nais tout ce qu’on voulait. Je vous chantais
avec un filet de voix à faire taire
tous les violoneurs et fluteurs, même
tambourineurs qui passaient par notre
village ; je vous dansais et sautais à faire
la nique aux jeunes chèvres que je menais
paître ; aussi, aux fêtes, sous
l’orme, c’était moi qui lassais tous les
garçons… et puis, pour la couture,
pour le blanchissage, pour le ravaudage,
pour la cuisine, et pour étriller
un cheval même et le faire galoper,
il n’y avait pas de fée qui eut pu m’en
remontrer !… Oh ! j’étais vraiment née
pour être princesse !… Avec ça j’avais
une malice et un caquet !… qu’il ne
fallait rien dire devant moi, da, car je
retenais et je répétais tout. Ma mère,
qui était la plus forte blanchisseuse de
Neuilly, craignant que toutes les caresses
qu’on m’y faisait à cause de mes espiégleries
et gentillesses, ne m’empêchassent
de prendre le goût de son état,
et de m’y perfectionner, s’imagina de
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GENEVIEVE.