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MA TANTE


fâchée de ma sortie de condition, que tous les postérieurs paraissant se refuser à ses travaux, elle n’aurait plus les moyens d’alimenter deux bouches. Cette triste et véritable réflexion me pénétra.

Arrivées chez elle, un des premiers effets de sa pénurie fut l’obligation de nous coucher sans souper ; heureusement nous n’en avions pas besoin, vu les à-comptes que nous avions pris avec les clercs mais le lendemain matin, nos estomacs commençaient à nous demander quelque chose à toutes deux… Nous avions auparavant pour habitude de nous les garnir chacune d’une bonne écuellée de café au lait, que ma tante savait très-bien faire… et on connaît la force des habitudes ! Nous regardions toutes deux, en soupirant, le poêlon de cuivre qui était accroché au beau milieu du devant de la cheminée… Mais ma tante, me montrant sa seringue suspendue à côté de lui, me disait douloureusement : « Hélas ! ma chère nièce,