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géantes, portant la phrase consacrée : Khoku est bienfaisant, Khoku vous guérira, essayez Khoku.

Louise de Bescé, qui se faisait appeler Louise Jalaviac, nom de sa mère, empaqueta des pilules Khoku deux jours durant. On la payait dix-huit francs par jour. Le troisième matin, le directeur la fit demander.

On l’introduisit dans un somptueux cabinet tendu de cuir rouge, avec des divans profonds comme des tombeaux. Un homme était là, porteur d’une tête d’hydrocéphale, barbu du front à la mâchoire, mais glabre sous le nez et sous le menton. C’était monsieur Khoku aîné, l’inventeur des pilules, un Russe de Tchita, à masque de Kalmouk, et qui bredouillait en parlant comme s’il eût la bouche pleine de bouillie. Il dit :

— Mademoiselle, vous avez mal emballé mes pilules.

Louise répondit hardiment :

— Vous vous trompez, monsieur, je fais mon travail très consciencieusement.

L’autre reprit, d’une voix plus pâteuse encore :

— Si ! Si… Je vais être obligé de vous mettre à la porte, à moins que…

— À moins que ? demanda naïvement la fille du marquis de Bescé.

— À moins que vous vous excusiez des malfaçons.

— Monsieur, si j’ai mal réussi certains emballages, je vous prie de m’en excuser, et d’être assuré que je m’efforcerai désormais de ne plus le faire.

— Ce n’est pas ce genre d’excuses, dit l’hydrocéphale.

— Lesquelles, monsieur ?